En 2020, le think tank The Shift Project publiait son rapport sur « Comment déployer la sobriété numérique ». Il s’agit d’une troisième étape de leurs études sur l’incidence du numérique pour notre planète. Deux autres rapports à ce sujet ont été publiés en 2018 et 2019. Nous vous présentons ici une synthèse du compte rendu de 2020, axée en trois points. Un rappel de l’enjeu de la sobriété numérique ouvrira la voie aux protocoles qu’elle nécessite. Nous finirons avec un survol des méthodes à mettre en place pour une maîtrise intelligente des ressources.
L’enjeu numérique dans la transition écologique
Nous ne pourrons pas nous passer du numérique, car il est l’instrument de notre évolution. Mais c’est aussi la source d’une empreinte carbone considérable tel qu’il est utilisé aujourd’hui. La sobriété numérique est un nouveau mode de fonctionnement qui permettra de conserver les atouts du numérique. Et ce, à travers des choix en faveur de la transition carbone. Il s’agit de contrôler le numérique de façon intelligente. Le rapport du Shift Project rappelle les limites auxquelles nous sommes confrontées : le réchauffement climatique et l’appauvrissement de toutes nos ressources.
Celles-ci constituent ce qu’ils nomment « la double contrainte carbone ». Le numérique a son rôle dans cela : la simple manipulation informatique est énergivore, ainsi que la production du matériel que cela nécessite. Au moment de leur étude, le Shift Project a recensé une augmentation moyenne de 9 % chaque année des consommations d’énergie liées aux systèmes numériques. De ce constat ressort un impératif majeur. Celui de comprendre en quoi l’usage que l’on fait du numérique est-il si néfaste, et comment modifier nos comportements. La sobriété numérique passera nécessairement par un agissement collectif pour un impact élargi. Le Shift Project appuie aussi l’intérêt d’une prise de conscience politique pour une utilisation du numérique favorable à notre santé. Notamment en ce qui concerne l’éducation.
Les mesures d’une sobriété numérique
Le dénouement des investigations menées par le Shift Project s’articule selon quatre propositions prioritaires. La première proposition vise à rendre systématique l’estimation du bien-fondé des usages numériques. Et ce, d’un point de vue environnemental. Chaque nouveau projet technologique devrait être soumis à un « bilan prévisionnel environnemental ». Cela permettrait une évaluation de sa pertinence écologique et ouvrirait la voie à une sobriété numérique originelle. La deuxième requête est d’obliger chaque organisation à conduire ses Systèmes d’information (SI) en toute conscience. Ceci devra se faire dans la prise en compte de la dimension environnementale, d’un point de vue stratégique et opérationnel. La sobriété numérique passera ici par des remises en questions de tout ce qui est déjà existant. Le caractère urgent d’un agissement public constitue la troisième proposition.
En effet, les autorités doivent abolir les pratiques d’une société de surconsommation. Il n’y a qu’en adoptant des mesures à l’échelle nationale que la sobriété numérique pourra s’étendre sur la société dans sa globalité. Enfin, le Shift Project préconise le maintien et la diffusion d’un raisonnement collectif à propos de la sobriété numérique. Le rapport dont il est question ici en est un fondement. Mais il est primordial de prolonger et d’entretenir cette discussion de façon publique et accessible.
Les outils de contrôle
Le Shift Project propose la mise en place d’une méthode d’analyse de la pertinence énergétique des nouvelles technologies.
Avec le modèle STERM (Smart Technologies Energy Relevance Model), développé par le think tank, toutes les organisations auront une ligne directrice dans cette ambition. Il s’agit d’un plan universel de sobriété numérique qui doit être adapté à chaque projet. En ce qui concerne le contrôle conscient des Systèmes d’Information, le Shift Project avance également un guide adressé aux grands organismes publics et privés. Le maître mot est la durabilité dans chaque prise de décision pour une sobriété numérique effective. L’action visera à faire usage des ressources et de l’énergie de manière optimisée, d’une part.
D’autre part, l’enjeu est de réduire le plus possible le remplacement du matériel informatique. Le bilan de ce rapport est bien l’urgence d’agir à plusieurs niveaux pour atteindre un objectif de neutralité carbone du secteur numérique. La sobriété numérique a donc vocation à faire un usage optimal des outils numériques, tout en limitant leur impact environnemental. Ceci n’est possible qu’avec la contribution des grands organismes et des autorités publiques, pour une résonance sur la globalité de notre société.