Introduction
Cet article est une synthèse de la conférence donnée par Luc Julia lors d’un événement organisé par Mind7 Consulting. Luc Julia, co-créateur de Siri et expert en intelligence artificielle, a partagé ses perspectives sur les réalités et les mythes entourant l’IA, les défis éthiques et sociaux qu’elle pose, et son potentiel pour transformer divers secteurs. En décomposant les concepts complexes et en abordant des exemples concrets, cette conférence a permis de démystifier l’IA et de clarifier son impact réel et ses limites par rapport à l’intelligence humaine.
L’intelligence artificielle (IA) fascine autant qu’elle intrigue. Souvent perçue comme une boîte noire mystérieuse et incompréhensible, elle suscite des craintes et des espoirs parfois disproportionnés. Cet article vise à démystifier l’IA, à comparer ses capacités à celles de l’intelligence humaine, et à examiner ses implications éthiques et réglementaires.
La Boîte Noire Dévoilée
L’IA est souvent vue comme une boîte noire en raison de la complexité de ses algorithmes et de ses processus de traitement des données. Cette perception est principalement due à l’absence de connaissance technique parmi la population générale.
Lorsque les systèmes d’IA sont introduits au grand public, ils sont souvent perçus comme des entités incompréhensibles. Cette perception de « boîte noire » provient de l’absence de connaissance technique parmi la population générale. Cependant, pour les scientifiques et ingénieurs qui développent ces systèmes, chaque composant et chaque algorithme est bien documenté et compréhensible. Les créateurs d’IA savent précisément quels algorithmes sont utilisés et pourquoi, quelles données sont sélectionnées et comment elles influencent les résultats. Par exemple, bien que des erreurs puissent survenir, comme dans le cas du chatbot Tay de Microsoft, ces erreurs sont explicables et corrigibles. Rien dans l’IA n’est véritablement inexplicable pour ceux qui la conçoivent.
Un Exemple Historique : Les Fractales de Julia et Mandelbrot
Pour illustrer comment quelque chose de perçu comme une boîte noire peut devenir compréhensible, il est utile de revenir à une découverte mathématique du début du 20ème siècle. En 1914, le mathématicien français Gaston Julia développa une équation maintenant connue sous le nom de fractales. Les fractales sont des structures mathématiques qui affichent une complexité infinie à chaque niveau de zoom. En 1955, Benoît Mandelbrot, un élève de Julia, introduisit cette équation dans un des premiers ordinateurs chez IBM. En visualisant les fractales, Mandelbrot rendit les propriétés complexes de l’équation accessibles et compréhensibles à travers des représentations graphiques. Ce qui était autrefois une boîte noire mathématique devint une illustration magnifique et compréhensible, montrant des motifs récurrents à chaque niveau de détail.
L’exemple des fractales montre comment une compréhension technique et une visualisation adéquate peuvent transformer une boîte noire en une boîte transparente. En IA, cette transformation est également possible. Les algorithmes peuvent être expliqués, les données peuvent être analysées, et les résultats peuvent être interprétés, rendant l’IA compréhensible. Cependant, l’effort de rendre ces systèmes transparents est crucial pour améliorer la confiance et l’adoption de l’IA.
Puissance de Calcul vs. Intelligence Humaine
L’intelligence artificielle (IA), bien qu’impressionnante dans sa capacité à traiter des volumes massifs de données, diffère fondamentalement de l’intelligence humaine. Cet écart se manifeste à travers la quantité de données nécessaires, la puissance de calcul utilisée, et les limitations intrinsèques des machines par rapport à l’esprit humain. Les systèmes d’apprentissage automatique (machine learning) des années 1990 utilisaient des volumes de données relativement modestes. Avec l’avènement du deep learning dans les années 2000, le volume de données nécessaires a considérablement augmenté. Les modèles de deep learning utilisent des millions, voire des centaines de millions de données pour fonctionner. Par exemple, ChatGPT 4.0 utilise plus de 1000 milliards de paramètres. Ces modèles sont si vastes qu’ils représentent presque l’ensemble d’Internet.
Les IA nécessitent une quantité énorme de données et une puissance de calcul considérable. En 2016, la machine AlphaGo de Google a battu le champion du monde de Go, un jeu beaucoup plus complexe que les échecs avec entre 10^200 et 10^600 coups possibles. Pour atteindre cette performance, AlphaGo a utilisé 1500 unités centrales de traitement (CPU), 300 unités de traitement graphique (GPU) et une trentaine d’unités de traitement tensoriel (TPU), soit un total de 2000 ordinateurs représentant une consommation de 440 kW. En comparaison, le cerveau humain fonctionne avec seulement 20 watts, une différence colossale qui souligne l’efficacité énergétique et la sophistication de l’intelligence humaine.
Spécialisation vs. Polyvalence
Une des différences majeures entre les IA et l’intelligence humaine est la spécialisation. Les IA sont conçues pour exceller dans des tâches spécifiques. Par exemple, AlphaGo est exceptionnel pour jouer au Go, mais cette machine ne peut pas cuisiner, converser ou réaliser d’autres tâches sans un reparamétrage complet et une nouvelle phase d’entraînement. En revanche, l’intelligence humaine est polyvalente. Une personne peut apprendre et s’adapter à une multitude de situations sans avoir besoin de réinitialiser ou de reprogrammer son cerveau.
IA : Réalité ou Fiction ?
L’IA est souvent mythifiée dans les médias et les films, mais la réalité est bien différente. Depuis les premiers systèmes experts jusqu’aux avancées en machine learning, l’IA a évolué mais reste limitée par la qualité des données et les algorithmes.
Histoire de l’Intelligence Artificielle
L’histoire de l’IA remonte à 1956, lors de la conférence de Dartmouth College. Des chercheurs se sont réunis pour discuter de la modélisation mathématique du neurone. Leur raisonnement était simple : si un neurone pouvait être modélisé, un réseau de neurones pourrait être créé, et éventuellement un cerveau artificiel, source de l’intelligence. Cependant, cette idée était fondamentalement erronée. La modélisation mathématique d’un neurone ne suffit pas à créer de l’intelligence, tout comme assembler des pièces détachées ne crée pas nécessairement une voiture fonctionnelle.
Dans les années 90, l’arrivée d’Internet apporta une quantité massive de données, revitalisant l’intérêt pour l’IA. Le machine learning, une approche basée sur les statistiques, devint populaire. Cette méthode permettait aux machines d’apprendre à partir de grandes quantités de données, ouvrant la voie à des applications plus avancées. Dans les années 2000, une nouvelle ère s’ouvrit avec le deep learning, une méthode encore plus sophistiquée de machine learning utilisant des réseaux de neurones profonds. Cette approche nécessitait encore plus de données et de puissance de calcul. L’IA générative, capable de créer du contenu nouveau, devint également un domaine de recherche intensif.
Les Problèmes Éthiques et Sociaux
L’IA soulève également des questions éthiques et sociales importantes. Les biais dans les données peuvent conduire à des décisions injustes ou discriminatoires. De plus, l’automatisation de nombreuses tâches soulève des préoccupations concernant l’emploi et la confidentialité.
Une Perspective Mathématique sur les Limites de l’IA
Définir l’intelligence est une tâche complexe qui a occupé philosophes, psychologues et scientifiques depuis des décennies. Plutôt que de s’engager dans un débat philosophique, cet article adopte une approche mathématique pour projeter les différentes définitions sur un graphique simple. Pour simplifier, imaginons un graphe où l’ordonnée représente le niveau d’intelligence (de 0 à 100) et l’abscisse, les domaines d’intelligence (langue, mathématiques, créativité, etc.). L’intelligence humaine, bien que variable selon les individus et les domaines, forme une ligne continue et infinie. Cela signifie que nous sommes capables d’apprendre et de nous adapter à de nouveaux défis, même inattendus, grâce à notre créativité et notre capacité d’innovation. Contrairement à l’intelligence humaine, les IA sont conçues pour exceller dans des domaines très spécifiques. Par exemple, une IA spécialisée dans les échecs peut battre n’importe quel humain à ce jeu, mais elle est totalement inutile pour d’autres tâches. Mathématiquement, cela se traduit par des lignes discrètes sur le graphe, chaque ligne représentant une compétence spécifique.
Il est crucial de comprendre pleinement les IA avant de les réglementer. Réguler trop rapidement peut freiner l’innovation et empêcher des applications bénéfiques. Par exemple, interdire la reconnaissance faciale dans son ensemble néglige les avantages potentiels pour les personnes handicapées.
IA : Entre Éthique et Innovation
L’intelligence artificielle fascine et effraie à la fois. Elle promet des avancées technologiques majeures, mais soulève également des questions éthiques cruciales. Cet article explore divers aspects de l’IA, des modèles basés sur de grandes quantités de données aux enjeux éthiques et réglementaires, en passant par l’impact sur l’innovation. Les modèles d’IA tels que ChatGPT, qui utilisent plus de 1000 milliards de données, nécessitent une quantité immense de ressources, notamment en électricité et en puissance de calcul. Cela pose des défis non seulement financiers mais aussi environnementaux. Les entreprises commencent à réaliser les coûts associés et cherchent des alternatives plus viables. Pour répondre à ces défis, une tendance vers les Small Language Models (SLM) se développe. Ces modèles, bien que toujours volumineux, utilisent moins de données et sont plus spécialisés. Ils offrent des performances comparables dans des domaines spécifiques, tout en étant plus économiques et écologiques.
Depuis plus de 15 ans maintenant, je travaille sur des sujets liés à la BI et à l’amélioration des processus. J’ai participé à un grand nombre de projets en tant que leader technique sur de nombreuses technologies.
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